Les deux propositions de minorité que j’ai déposées concernent, d’une part, l’article 74a alinéa 3: « Les effets sur le climat des gaz à effet de serre d’origine anthropique émis en Suisse doivent être durablement neutralisés d’ici à 2040 … », au lieu de 2050. D’autre part, ma minorité propose une modification de l’article 197, soit les dispositions transitoires de l’article 74a alinéa 2: « La loi détermine la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu’à 2040 … « , au lieu de 2050.
Mes deux minorités ont au fond pour but de faire gagner dix ans. Dix ans, ce n’est ni symbolique ni idéologique, c’est juste vital. Alors que le dérèglement climatique s’emballe, chaque minute compte pour renverser la tendance. Les preuves sont aujourd’hui indéniables et les risques augmentent. Il n’y a plus aucune excuse! L’objectif de 2050 est beaucoup trop lointain.

Non seulement le contre-projet ne prévoit pas de s’émanciper totalement des énergies fossiles, c’est clairement énoncé à l’article 74a alinéa 2: « L’utilisation de combustibles et de carburants fossiles doit être réduite autant que possible dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique, économiquement supportable … » On n’est pas en train de s’émanciper complètement des énergies fossiles. En plus, le contre-projet maintient le cap de 2050. Le tout est largement insuffisant.

Le dernier rapport du GIEC publié il y a à peine deux jours fait froid dans le dos. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres va droit au but: « J’ai vu de nombreux rapports scientifiques, mais rien de comparable à celui-ci. C’est un recueil de la souffrance humaine et une accusation accablante envers l’échec des dirigeants dans la lutte contre le réchauffement climatique ».

Les populations les plus vulnérables, les plus pauvres, les moins connectées seront les plus touchées. Et la Suisse n’est pas épargnée. Les glaciers fondent, le dérèglement climatique nous touche aussi; avec notre train de vie, la Suisse se dirige vers un scénario mondial à près de 6 degrés d’augmentation, si on ne change pas aujourd’hui. Certes, nous avons peu d’industrie et délocalisons donc une grande part de notre impact. Mais cela n’atténue ni notre impact, ni notre responsabilité. La Suisse, en signant l’Accord de Paris, s’est engagée à ce que la hausse moyenne de la température mondiale soit maintenue en dessous de 1,5 degré. Il faut donc respecter cet engagement et accélérer – accélérer – notre engagement politique, se réveiller, se dépêcher.

C’est une réponse à la hauteur des enjeux qu’on doit donner aujourd’hui. Activer notre sortie des énergies fossiles est nécessaire. Je vous invite donc à gagner dix ans et à inscrire dans le contre-projet direct – si celui-ci était accepté – l’objectif de 2040 au lieu de 2050. Ce n’est ni cosmétique, ni anodin. Ce sera vital.

Vous avez peut-être l’impression d’avoir le temps, mais nous sommes déjà bien en retard. Le cap fixé aujourd’hui n’est pas une contrainte, il s’agit d’un appel à notre inventivité et à notre capacité à répondre à l’urgence climatique. Soyons ambitieux et ambitieuses pour la Suisse, arrêtons de nous conforter dans la paresse des énergies fossiles!

Je vous remercie d’accepter ma proposition de minorité. Gagnons dix ans, on peut le faire aujourd’hui en soutenant cette minorité.