Delphine Klopfenstein Broggini

Auteure de cet article de blog

Les violences sexuelles et sexistes, notamment les violences domestiques, l’exploitation sexuelle, le mariage forcé, les mutilations génitales, la traite, les législations discriminatoires, la répudiation, la privation de leurs enfants, poussent de nombreuses femmes et filles à fuir leur pays et à demander l’asile en Europe.

Ces femmes et ces filles sont exposées aux violences et à l’exploitation sur leur parcours migratoire : violences sexuelles exercées par les passeurs ou dans les centres de détention, les camps de réfugiés, exploitation sexuelle ou par le travail forcé, vente par des groupes armés à d’autres groupes armés, enfermement dans des réseaux de traite des pays de transit, y compris dans les pays européens, menaces contre elles-mêmes ou des proches restés au pays, traumatismes et dangers subis par leurs enfants.

Un accueil inadapté pour les femmes en Europe et en Suisse

Arrivées en Europe et en Suisse, l’accueil est souvent inadapté, faute d’une prise en compte active des violences subies, par manque de personnel formé sur ces questions et insuffisants en nombre.

Les procédures d’asile actuelles ne permettent pas encore suffisamment d’identifier les victimes de violence fondées sur le genre ou les victimes de traites. Les structures d’hébergement ne sont souvent pas appropriées et les mesures de soutien sont déficitaires.

Trop souvent, les motifs d’asile spécifiques aux femmes et filles ne sont pas reconnus, en dépit des principes énoncés dans plusieurs directives européennes et des dispositions de la Convention d’Istanbul, approuvée par l’Assemblée fédérale le 16 juin 2017, qui reconnaît la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre comme une forme de persécution donnant droit à la protection internationale.

Une interpellation au Conseil fédéral pour agir (enfin!)

J’ai déposé une interpellation au Conseil national Quel accueil de la Suisse pour les femmes et les filles arrivées d’Afghanistan? qui demande au Conseil fédéral d’expliciter les mesures qu’il prévoit de mettre en place afin que ce besoin de protection spécifique des femmes et filles afghanes soit pris en compte dans d’autres procédures comme les demandes de visas humanitaires ou de regroupement familial.

Il s’agit ici surtout de garantir au moins le droit à une protection. En garantissant par exemple la mise en place d’une procédure d’identification des victimes de violences sexuelles et sexistes ainsi qu’une prise en charge adaptée aux besoins spécifiques des femmes et des filles. Le temps n’est plus aux atermoiements:

  • La Suisse doit intensifier la collaboration avec des structures spécialisées, notamment dans les centres fédéraux d’asile.
  • La Suisse doit accorder des moyens supplémentaires pour garantir un meilleur accès aux soins.

Un mot particulier doit être adressé ici aux femmes et aux filles en Afghanistan face à la restriction de leurs droits. Le dernier rapport sur l’Afghanistan de l’European Union Agency for Asylum (EUAA) stipule que l’accumulation de diverses mesures introduites par l’émirat islamique d’Afghanistan, qui affectent les droits et libertés des femmes et filles en Afghanistan, est de nature à constituer une persécution au sens de la Convention sur les réfugiés. Dans ce contexte, le Danemark et la Suède ont décidé, il y a 6 mois, que les femmes et les filles remplissaient la qualité de réfugiées du seul fait de leur genre. Ces démarches chez nos voisins européens doivent plus qu’inspirer la Suisse, elles doivent pousser notre pays à agir.